Perspectives économiques 2023

  • Economie mondiale : en route vers un net ralentissement de la croissance
  • Inflation exagérément élevée reste un problème majeur
  • La politique monétaire entre dans une nouvelle phase
  • Les taux d'intérêt à long terme atteignent un pic dans la première moitié de l’année
  • Risque augmenté pour la stabilité financière
  • La Belgique n'échappera pas à une récession modérée

L'économie mondiale se dirige tout droit vers un net ralentissement de la croissance. Nombre d'économies majeures et européennes entrent dans une phase de récession modérée. La constitution d'importantes réserves de gaz devrait certes permettre aux pays européens de passer l'hiver au chaud et d'éviter des pénuries d'énergie prolongées et critiques. Mais les risques qui pèsent sur les perspectives de croissance sont fortement orientés à la baisse, compte tenu de l'incertitude et des risques économiques et géopolitiques extrêmement élevés. Un resserrement monétaire trop zélé (aux États-Unis), l'aggravation de la crise immobilière et la politique de tolérance zéro à l'égard du coronavirus (en Chine), ainsi que les difficultés à reconstituer l'approvisionnement en gaz en 2023/2024 (dans l'UE) sont les principaux risques à la veille de 2023. Le risque d'un net repli économique est élevé. Pourtant, les derniers indicateurs économiques continuent plutôt de pointer vers une récession modérée. Nous demeurons donc fidèles à notre scénario de base d'une « récession modérée ».

Des niveaux d'inflation exagérément élevés posent un problème majeur pour l'économie mondiale. Certes, l'inflation est peut-être sur le point de culminer, dès lors que les marchés de l'énergie se stabilisent ou se tassent, et que la politique monétaire commence à produire ses effets. Mais dans de nombreux pays, le refroidissement de l'inflation attendu pour 2023 ne devrait se produire que graduellement. Nous nous attendons à ce que la contribution de l'inflation des prix de l'énergie diminue fortement. En revanche, les différentes composantes de l'inflation sous-jacente devraient rester une source d'inflation plus persistante. Dans plusieurs pays européens, les pressions salariales et les ajustements aux prix réglementés de l'énergie généreront des pressions inflationnistes à la hausse.

La politique monétaire entre dans une nouvelle phase. Les banques centrales les plus promptes à entrer en action (comme les banques tchèque et hongroise) font maintenant une pause ou mettent fin à leur cycle de resserrement. Pendant ce temps, les grandes banques centrales, et en particulier la Fed et la BCE, annoncent un ralentissement de leur trajectoire de resserrement. La Fed et la BCE vont selon nous progressivement relever leurs taux directeurs au-dessus du niveau neutre, avant de le stabiliser à des niveaux nettement supérieurs à 5 % et 3 %, respectivement, au cours de l'année 2023. L'une comme l'autre risquent de maintenir leurs taux directeurs à des niveaux plus élevés pendant une période plus longue (higher for longer). Qui plus est, la Fed a déjà entamé le resserrement quantitatif de sa politique. La BCE devrait lui emboîter le pas début 2023.

Les taux d'intérêt à long terme pourraient atteindre un pic dans peu de temps, si ce n'est déjà fait. Tant dans la zone euro qu'aux États-Unis, les taux d'intérêt à long terme devraient culminer au cours du premier semestre 2023. Ils entameront ensuite une décrue progressive, et d'ici 2024, les prix du marché commenceront de plus en plus à intégrer une diminution des taux directeurs à moyen terme. Quoi qu'il en soit, la courbe des taux devrait selon demeurer plate ou inversée dans la plupart des économies.

Les risques pour la stabilité financière augmentent. Alors que les fondamentaux économiques s'inversent et que les liquidités sont retirées du système financier, nous nous attendons à ce que les marchés financiers - en particulier les segments moins liquides - demeurent volatils et sensibles à l'actualité macroéconomique. Le taux d'endettement élevé de la partie non bancaire du secteur financier représente un risque pour la stabilité financière. Les marchés immobiliers, légèrement surévalués, pourraient bien se refroidir à mesure que les fondamentaux économiques s'inversent.

L'économie belge n'échappera pas à une récession modérée, même si la croissance annuelle du PIB réel devrait rester légèrement positive, à 0,1 %, en 2023. L'indexation des salaires atténuera l'impact d'une inflation élevée sur le revenu réel disponible des ménages. Par conséquent, la crise énergétique ne devrait pas affecter trop sérieusement la consommation. Du côté des entreprises, les fortes hausses des salaires pèsent sur la compétitivité. Et par conséquent sur les exportations et la propension des entreprises à investir. Même si l'inflation ralentit au cours de l'année 2023, elle restera anormalement élevée et s'accompagnera de risques de hausse pendant un certain temps encore. En cause, la répercussion de l'augmentation des coûts, y compris la hausse des salaires. Pour 2023, nous tablons sur une inflation moyenne de 6,4 %.

 

Tensions sur les taux et craintes de récession à l'horizon 2023 : le long, incertain et tortueux chemin vers un nouvel équilibre économique

L'utopie des roaring twenties : la reprise économique de 2021 ouvre la voie à un ralentissement de la croissance mondiale et les craintes de récession augmentent de jour en jour

L'économie européenne s'appauvrit à un rythme soutenu, tandis qu'une inflation hors de contrôle sape la confiance et érode le pouvoir d'achat

La politique de tolérance zéro vis-à-vis du coronavirus et l'aggravation de la crise immobilière en Chine, les craintes d'inflation, le resserrement monétaire et l'invasion de l'Ukraine par la Russie et les ondes de choc qui en ont résulté sur les marchés des matières premières ont maintenu l'économie mondiale dans un étau depuis plus d'un an maintenant. Cela a également mis un terme brutal à la reprise économique en forte accélération dans le monde entier depuis le second semestre 2021.

La grande incertitude économique et le déclin général de la confiance économique poussent de plus en plus l'économie mondiale au bord de la récession. Dépendante et très gourmande sur le plan énergétique, l'économie européenne est frappée de plein fouet par la crise énergétique. Les économies européennes s'appauvrissent à un rythme soutenu (davantage encore que pendant la crise pétrolière) et l'inflation non maîtrisée mine la confiance économique et érode le pouvoir d'achat. La Chine, deuxième économie mondiale, reste sous le coup de politiques de lutte contre le coronavirus restrictives et d'une crise immobilière menaçante, tandis que l'économie américaine est surtout confrontée à un net resserrement des conditions financières.

 

Une économie étonnamment résiliente, mais le risque de récession augmente

Les modèles économiques basés sur les indicateurs avancés signalent un risque de récession toujours plus grand

Jusqu'à présent, l'économie s'est montrée étonnamment résiliente. Malgré des chocs économiques majeurs, la consommation privée a continué de soutenir la croissance au niveau mondial. Mais le stress financier reste élevé pour les ménages, qui vont progressivement finir par réduire leur consommation. Les indicateurs avancés indiquent de plus en plus qu'une récession (technique) sera difficile à éviter. Bien que l'économie mondiale affiche un net ralentissement, KBC Economics table sur le scénario d'une récession modérée.

L'économie fait preuve de résilience et l'étroitesse du marché du travail contribuera à empêcher une trop forte hausse du chômage. Les risques baissiers sont néanmoins très élevés. Pour 2023, nous estimons la croissance du PIB réel à 0,4 % pour les États-Unis et à 0,2 % dans la zone euro (0,1 % pour la Belgique (voir ci-dessous), 0,7 % pour la République tchèque, 0 % pour la Hongrie, 0,6 % pour la Slovaquie et 0,7 % pour la Bulgarie). Pour l'économie européenne, il s'agit de la quatrième crise majeure depuis la crise financière de 2008-2009. Tout au long de ces différentes crises, il est clair que les dommages à long terme, dus en partie à des investissements retardés (différés), sont importants.

 

L'inflation a atteint un pic aux États-Unis et en Europe et ralentira progressivement en 2023. De ce fait, l'accent est mis non plus sur l'inflation énergétique, mais sur l'inflation sous-jacente. 

Le pic d'inflation est atteint, mais l'inflation sous-jacente élevée et inerte reste préoccupante

Le turbo de l'inflation se met (enfin) en marche. L'inflation des prix de l'énergie, qui était la principale cause de l'inflation galopante en 2022, diminuera au cours de l'année 2023, en raison d'une stabilisation ou d'un tassement des prix de l'énergie. Il semblerait donc que l'inflation ait atteint son point culminant. Nous tablons à présent sur un recul progressif. Mais l'inflation de base sera à la traîne en 2023 et restera obstinément élevée pendant un certain temps encore. Il s'agit là d'un point important à prendre en considération.

L'inflation sous-jacente reste élevée aux États-Unis et semble encore progresser dans la zone euro. Elle est portée plus que prévu par une demande soutenue. Selon certaines études, ce serait le cas pour plus d'un tiers. En Europe, les entreprises continueront de répercuter la hausse de leurs coûts (énergétiques) et les pressions salariales commenceront également progressivement à s'intensifier. Ces effets indirects de l'inflation énergétique prendront le dessus et alimenteront davantage l'inflation à court terme. On ne s'attend donc qu'à une normalisation progressive de l'inflation en 2023. Nous estimons l'inflation annuelle moyenne aux États-Unis à 3,9 %, contre 6,3 % dans la zone euro (pour la Belgique, elle est de 6,4 %, voir ci-dessous).

 

Les banques centrales décélèrent sur la voie de la transition vers une politique de taux« plus élevés pour une période plus longue », tout en réduisant leurs bilans.

Les taux directeurs « à des niveaux plus élevés pendant une période plus longue », tandis que les banques centrales réduisent leurs bilans

Les hausses surprises et répétées de l'inflation, qui ont conduit à des pics d'inflation hors de contrôle en 2022, ont forcé les banques centrales des plus grandes économies à prendre un virage à 180°. La politique d'injections massives de liquidités a fait place à un resserrement extrêmement ferme et accéléré. Les taux directeurs ont ainsi atteint des niveaux élevés à une vitesse vertigineuse. Avec l'atténuation des pressions inflationnistes et le ralentissement de l'inflation, les banques centrales lèvent le pied. Mais le risque d'une inflation de base élevée et inerte signifie que les taux directeurs resteront « à des niveaux plus élevés pendant une période plus longue ». Les banques centrales visent à court terme des taux directeurs supérieurs au taux « neutre » et accompagnent cette politique conventionnelle d'un désendettement de leurs bilans. La Fed s'est déjà lancée dans la manoeuvre en 2022 et la BCE devrait l'imiter au printemps 2023.

Dans le cas de la BCE, le resserrement quantitatif passe également par la réduction des prêts à long terme accordés par la banque centrale au secteur financier par le biais de ce que l'on appelle les TLTRO. La hausse des taux directeurs et le désendettement des bilans signifient également que la liquidité sur les marchés financiers se fait plus chère et plus rare. Avec ce dégonflement synchronisé de leurs bilans, les banques centrales entrent en terrain inconnu. Les risques de liquidité augmentent donc, mais dans le même temps, les réserves historiquement élevées du secteur financier auprès de la BCE (environ 4 500 milliards d'euros dans la zone euro) sont progressivement réduites et au moins partiellement neutralisées. Le resserrement de la politique monétaire pousse également les taux à long terme vers un nouvel équilibre, à un niveau plus élevé. Cela marque la fin définitive d'une longue période d'« argent gratuit ».

 

La politique monétaire et la politique budgétaire en Europe s'entrechoquent

Vers un « clash » entre la politique monétaire et la politique budgétaire ?

Avec l'inversion de la politique monétaire, la « Divine coïncidence » entre la politique monétaire et la politique fiscale prend fin immédiatement. Dans la mesure où la politique monétaire est exclusivement axée sur le ciblage de l'inflation, il ne reste à l'Europe que la politique budgétaire pour faire face à l'impact de la crise énergétique et aux défis structurels (vieillissement de la population, transition vers une économie plus durable, etc.) La bulle d'air créée par l'extension de la « clause de sauvegarde » en 2023 est partiellement absorbée par l'impact du resserrement de la politique monétaire, qui se fera clairement sentir en 2023.

L'augmentation du taux d'endettement dans un contexte de croissance plus faible et de taux plus élevés rend les économies européennes plus vulnérables. Toutefois, la politique budgétaire doit être plus ciblée. En effet, la crise énergétique est fondamentalement différente de la crise du coronavirus en ce qu'elle affecte le potentiel productif. La politique budgétaire doit donc être plus sélective et tendre vers ce nouvel équilibre. Elle prend aujourd'hui plus de place qu'il n'est souhaitable et, à cet égard, elle « monopolise » l'appel d'air créé par la clause de sauvegarde. 

 

Et qu'en est-il en Belgique ?

Sans mesures compensatoires, l'inflation aurait frappé encore plus durement les groupes à faibles revenus en termes relatifs.  

L'économie belge n'échappera pas non plus à une récession technique modérée. Concrètement, cela implique un taux de croissance trimestriel négatif du PIB réel fin 2022 et début 2023. Le taux de croissance annuel estimé pour 2023 reste toutefois légèrement positif, à 0,1 %. L'indexation des salaires amortira quelque peu l'impact de l'inflation élevée sur les revenus réels des ménages, évitant à la consommation privée d'être trop durement touchée par la crise énergétique. Du côté des entreprises, la forte croissance des salaires érode la compétitivité, ce qui pèsera sur les activités à l'exportation et la propension à investir. Il est également probable que l'inflation belge ait désormais dépassé son pic. Même si les taux d'inflation diminueront en 2023, ils resteront anormalement élevés avec des risques de hausse pendant un certain temps encore, en raison de la répercussion de l'augmentation des coûts sur l'inflation de base, notamment par le biais de la hausse des salaires. L'inflation annuelle moyenne pour 2023 est estimée à 6,4 %.

Si la consommation privée dans son ensemble devrait encore bien se tenir, il ne faut pas sous-estimer l'impact socio-économique potentiel de la bulle inflationniste de 2022. L'inflation s'est principalement concentrée sur certains biens et services essentiels, notamment l'énergie et les denrées alimentaires. Sans mesures compensatoires, cette inflation aurait frappé de manière disproportionnée les groupes à faibles revenus. Pour la Belgique, la différence (non compensée) de pression sur les prix entre le quartile de revenu le plus élevé et le quartile le plus bas de la population s'élève à plus de deux points de pourcentage, principalement en raison des prix de l'énergie et des loyers.

Les nombreuses mesures prises pour amortir l'impact des prix élevés de l'énergie ont contribué au maintien du déficit budgétaire public à un niveau élevé en 2022. En 2023, ce déficit devrait encore se creuser pour atteindre 6,0 % du PIB, en raison de la détérioration du paysage macroéconomique.

 

 

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Stef Leunens Corporate Communication Manager
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